Aimé Bonna est connu pour avoir inventé le tuyau en béton
armé. Ingénieur à la ville de Paris, il démissionne peu après et il fait
breveter son invention pour profiter des vastes chantiers que lui ouvre le
projet d'épuration des eaux usées de Paris et de sa banlieue.
Il installe son usine de
production sur Achères et Conflans-Sainte-Honorine. Il étend son activité en
province et à l'étranger (Belgique, Pays-Bas, Espagne).
En 1924, âgé de 69 ans, il
met un terme à ses activités professionnelles et il vend à la Compagnie Générale
des eaux usées son entreprise qui prend le nom de Société des Tuyaux Bonna. Une page se tourne. Retraité, Aimé Bonna reste actif, il se lance dans une nouvelle
aventure. Il est riche. Il n'a pas de descendance.
Aimé Bonna est issu d'une famille catholique
pratiquante d'Hirson. Son frère aîné , Augustin,
était président d'une Conférence de Saint Vincent de Paul (mouvement fondé
par Frédéric Ozaman) et aussi tertaire
franciscain (laïc rattaché à l'Ordre fondé par Saint François d'Assise),
comme sa soeur cadette, Marie. Son frère cadet, Victor était prêtre, curé de Braye-en-Thiérache et son neveu Maurice, fils d'Augustin,
devenu prêtre il occupera le poste de Vice-chancelier à l'Evêché de Soissons.
BONNA BÂTISSEUR
Aimé Bonna sentant - peut-être - sa mort prochaine n'avait pas
oublié sa foi et sa ville d'attache d'Hirson. Il propose de construire à ses
frais dans un matériau qu'il connaît bien, une seconde église dont je
rappelle que l'église Notre-Dame de Lourdes est reconstruite en 1909 après un
incendie criminel, en 1906. La nouvelle église Sainte Thérèse (en ville
haute) dont la première pierre est posée le 3 octobre 1929 aura mission à
servir les cités cheminotes des Champs-Elysées
et de Buire, proches de la gare des Chemins de Fer Français du Nord et
de ses infrastructures.
SELON LES PLANS BONNA
Le terrain et les matériaux sont achetés par Aimé Bonna. Il dresse les plans du nouvel édifice cultuel et
il finance l'opération, main-d'oeuvre comprise. Ce sera l'une des premières
églises à être construite entièrement en béton armé. l'église sera constituée
de deux bas-côtés encadrant une nef à sept travées et à chevet plat. Les
autels latéraux seront dédiés à la Vierge et à Jeanne d'Arc. L'église
comportera une crypte à trois travées soutenue par des colonnes. La facade haute de 23 m. sera flanquée de deux tours. La
rosace fera une auréole à la statue de Sainte Thérèse. Au pied de la
statue, un bas relief de style art-déco
représentera des anges agenouillés dans un parterre de roses ; les roses en
plâtre constitueront le motif intérieur de l'église (voûte, nef et plafond).
Elles auraient pu, si cela s'était passé conformément au plan
initial, s'illuminer de 1500 lampes. Quant au campanile adjacent -
en béton armé - il culminera à 45
m. Un calcul d'Aimé Bonna
pour qu'il soit aperçu à des kilomètres à la ronde ?
Aimé Bonna n'assistera pas à la mise hors d'eau de
son église. Il meurt dans la souffrance dans sa propriété d'Achères le 18
novembre 1930. Dans l'église Sainte Thérèse, une chapelle ardente est dressée
entre les quatre murs qui n'ont point de voûte en berceau pour acceuillir la dépouille mortelle qui est entourée
de la famille, d'hirsonnais et parmi les
signataires des procès-verbaux, un évêque, huit chanoines, vingt sept abbés,
quatre conseillers de fabrique, un sénateur, un aumonier
notaire écclésiastique.
Les nombreux hirsonnais se rendent de l'église
Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus jusqu'à l'église
Notre-Dame de Lourdes où un service religieux est célébré par le Chanoine Antoni Gougelot, doyen
d'Hirson. A l'issue de l'office, le cortège funèbre se forme pour
accompagner Aimé Bonna jusqu'à sa dernière demeure
au cimetière d'Hirson. Les coins du drap sont tenus par MM. Villemant, sénateur-maire,
Bourse, Gattelet et Boulicourt.
Au cimetière, M. Emile Villemant adresse les
derniers adieux au défunt et la gratitude de la population hirsonnaise.
La "basilique" Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus est
consacrée le 30 septembre 1931 avec fastes voire clôturé par un banquet.
TRISTESSE de la POPULATION
Après des séances
de travail, il est décidé de faire abattre le campanile qui présente quelques
faiblesses. Le béton armé s'est fissuré ébranlé par la résonnance des cloches. Il n'a pas tenu 80 ans... Le 24
novembre 2008 alors que se prépare la fête et la
traditionnelle foire de la Sainte Catherine.
Evénement majeur.
Ce n'est pas par un son de cloche que les foules sont
rassemblées au delà du périmètre de sécurité mais, dans l'attente d'une
détonation. A 11 h.30, forte déflagration et la partie haute du
campanile s'effrondre dans un amas de béton éclaté
par un dynamitage calculé. L'arrêté de péril a fait son oeuvre. Le coq perché
et si fier, maintenu à la pointe, en aura probablement vu de toutes les
couleurs dans sa chute de 45
m.
Fin d'une époque. C'était l'église des cheminots des Champs-Elysées
et de la cité de Buire. Les souvenirs ont refait surface pour
avoir été un enfant de choeur pour certains, ayant assistés à la célébration
des offices, fait leur communion solennelle, leur mariage pour d'autres.
Aimé Bonna, l'inventeur du béton armé a écrit une
page dans l'histoire de la ville d'Hirson.
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